Créer ?


Aujourd’hui, les mains rivées au clavier, je m’interroge.
Pourquoi écrire ?
Qu’est-ce qui anime cet élan ? Quelle part de moi ?
Est-ce mon égo qui réclame sa dose de reconnaissance ?
Est-ce ma part créatrice qui cherche par tous les moyens à se mettre en lumière, à dire sa vérité ?
Est-ce l’état du monde qui m’entoure qui tourmente mon cœur ?
Est-ce mon chemin ?
Une nécessité viscérale ?
Un p’tit mélange de tout ça, cocktail tutti-frutti ! Avec une tranche d’orange en haut du verre ?
J’aime ce défi à chaque fois renouveler de tenter d’exprimer l’inexprimable. Rendre compte de la complexité et de la complétude du vivant, avec des mots, de la musique, du rythme, quand la puissance et la beauté vertigineuse du réel nous réduit au silence, bouche bée, les yeux écarquillés.
Alors s’illumine dans l’onde caressante de mon âme la seule perspective possible, l’ingrédient qui sublime, qui transcende l’exercice, qui fait jaillir la grâce. Une pincée discrète qui flotte et illumine, fragrance volatile, la poésie.
C’est elle, notre part divine. C’est elle et seulement elle qui fait qu’aucune intelligence mécanique, la plus complexe et la plus pointue soit-elle, ne pourra jamais nous remplacer.
C’est cette part fragile, fugace, presque indicible, qui donne sa grandeur à notre espèce bancale.
C’est elle qui fait que chaque jour, je me lève avec la lumière au creux de mon cœur, au centre de mon cerveau.
C’est elle qui dit sa vérité au sentiment amoureux, qui donne envie d’explorer le monde, de danser au milieu des étoiles, de plonger dans l’immensité océane pour en goûter l’écume, de parcourir forêt et montagnes et contempler au détour d’un sentier, la singularité d’une lumière d’été, l’or liquide et chaud de l’automne, l’étincelant silence de l’hiver, la joie enfantine éclatante de couleurs parfumées du printemps.
Et dans ces moments là, quand la chaleur apaisante de cette poétique vivante vient réchauffer mon être, alors une irrépressible envie de danser et de chanter s’empare de moi, et je sens dans mon ventre l’enfant sauvage et ingénu qui éclate de joie, de rire, et de vitalité.
Il n’est rien d’impossible !
Vivre ! Regarder la mort, les morts successives du mouvement qui nous libère à travers nos transformations salvatrices, qui nous libère de notre trop lourde pesanteur.
Allégés, enfin libérés de nos chaines familières, de notre inconfort rassurant, nous nous élançons avec agilité dans les profondeurs de notre âme pour en extraire la quintessence.
Alors la beauté peut jaillir dans la spontanéité de notre élan créateur et nourrir notre Humanité.


Fabrice Torok, le 06/04/2023